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Cette section propose la liste des notices contenues sur le cédérom de l'Encyclopédie du Mouvement wallon. Les notices accessibles en ligne sont datées : le carré jaune indique les mises à jour, le carré rouge signale les nouvelles notices.

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Magnette Charles 

    Né à Virton le 3 février 1863, décédé à Liège le 18 octobre 1937 

Docteur en droit de l’Université de Liège (1885), candidat notaire (Université de Liège, 1886), Charles Magnette poursuit ses études à Lausanne, Paris et Berlin avant de devenir avocat puis bâtonnier du barreau de Liège en 1917-1918. Il est alors stagiaire chez Me Xavier Neujean (père). Juriste distingué, orateur chaleureux et précis, Magnette conquiert peu à peu une des premières places au barreau de Liège. Frère de l’historien Félix Magnette, Charles Magnette est le père de Paul Magnette.

Fondateur du journal L’Express de Liège, député libéral radical de l’arrondissement de Liège (1894-1900), secrétaire de la Chambre (1898-1900), conseiller communal de Liège (1904-1926), sénateur provincial (1906-1932), tour à tour secrétaire (1912), vice-président (1924) puis président du Sénat (1928-1932), ministre d’État (2 avril 1925), Charles Magnette est le grand maître du Grand Orient de Belgique et l’un des fondateurs de l’Association maçonnique internationale. Dès le 27 septembre 1914, il lance un appel aux neuf grandes Loges allemandes pour arrêter la guerre ; il leur propose aussi de constituer une commission d’enquête impartiale à propos du sac des villes belges. En vain. Par la suite, il proteste, au nom de la franc-maçonnerie belge, contre les déportations en Allemagne (lettre du 7 décembre 1916) ; il est arrêté le 15 décembre 1916 ; sa prise de position lui vaut plusieurs semaines de prison. Bien avant la création de l’Assemblée wallonne, Charles Magnette s’est manifesté par son combat contre les lois proposées de 1894 à 1900 pour régler la question des langues ; son opinion est simple et claire : il rejette le bilinguisme. Ainsi, en janvier 1897, lors d’un meeting de protestation, s’oppose-t-il à la loi Coremans. « À mon sens, cette loi est mauvaise et néfaste car elle met aux prises deux races. Je ne me fais pas un fétiche de l’idée de patrie. Il faut cependant convenir qu’il y a ici plus de liberté que dans la France républicaine ou dans la royaliste Allemagne. Il est donc à souhaiter que nous restions Belges. Pour cela, il faut que Wallons et Flamands restent unis. Mon âme de Wallon se révolte contre les prétentions flamingantes. (…) La faute en incombe au gouvernement. Maintenant, on veut nous écraser et de même que les Flamands disent : « In Vlaanderen vlamsch », nous dirons « La wallonnie (sic) aux Wallons ». En 1898, il accepte de devenir membre du comité de patronage de la Ligue wallonne de Liège. En 1905, il accepte de faire partie du comité de patronage du Congrès wallon qui se tient à Liège les 30 septembre, 1er et 2 octobre.

Libéral progressiste, partisan du service militaire personnel, il s’élève au Sénat contre le détournement de Liège des grands express internationaux. Affirmant les droits de la Wallonie dans la question des langues, il cherche en même temps des terrains d’ententes avec ses homologues flamands.

Le 27 janvier 1911, Charles Magnette participe, à Bruxelles, à la réunion de travail du Comité d’études pour la sauvegarde de l’autonomie des provinces wallonnes. Ce Comité a été constitué à l’initiative de la Ligue wallonne de Liège en vue d’étudier la question de la séparation administrative. En quelque sorte, ce comité prépare l’Assemblée wallonne qui est créée en 1912 à l’issue du Congrès wallon de juillet. Membre-fondateur de l’Assemblée wallonne, Charles Magnette lui apporte, pendant un quart de siècle, une collaboration constante et une approbation qui, jusqu’au dernier jour, ne s’est jamais démentie. Représentant l’arrondissement de Neufchâteau-Virton, sa région natale, il préside les sessions de l’Assemblée wallonne à plusieurs reprises, surtout lorsque celle-ci doit se prononcer sur des questions difficiles. Il assure aussi quelques fois le bureau permanent de sa présence et de ses conseils. Il est surtout le président de la Commission de la Justice.

Durant la Grande Guerre, resté au pays, Charles Magnette s’impose comme une personnalité de référence. Respectueux de l’Union sacrée, il souhaite cependant que les Wallons ne soient pas dupes de cette attitude de respect et de silence en matière de politique intérieure tant que les Allemands occuperont la Belgique. Avec quarante-cinq ministres d’État, sénateurs et députés, wallons, bruxellois et flamands, il adresse une pétition, le 12 juin 1917, au chancelier allemand contre les déportations de fonctionnaires et contre la séparation administrative. Et dans le même temps, attentif à la défense des intérêts wallons, il se montre critique à l’égard du gouvernement du Havre, auquel il adresse des rapports analysant la situation au pays. En juillet 1917, Charles Magnette fait savoir au baron Capelle le mécontentement des Wallons. En portant la querelle belge sur le plan international, on pousse les Wallons dans les bras de la France ; le gouvernement belge ne fait rien ; les activistes pactisent de plus en plus avec les Allemands et l’ouverture de l’université flamande de Gand est la goutte qui fait déborder le vase ; que le gouvernement proclame partout sa volonté de respecter les droits des Flamands conduit à penser que le bilinguisme sera bientôt imposé aux Wallons et de cela ils n’en veulent pas. Il résiste aussi aux sollicitations allemandes de participer à l’élaboration de la séparation administrative et décourage vivement tous les Wallons qui y sont tentés : « entrer dans les ministères wallons, c’était manquer aux lois du plus élémentaire patriotisme ». Il tente de décourager Oscar Colson qui accepte d’être nommé directeur au ministère wallon des Sciences et des Arts. Il repousse les invitations d’Arthur Limet qui verrait bien Charles Magnette vice-président d’un Conseil wallon, équivalent du Raad van Vlaanderen, présidé par le Zivilverwaltungschef pour la Wallonie, Edgard Haniel von Haimhausen.

                                                                                

Dans le même temps, Magnette est en contact avec les milieux français via le consul de France à Liège. Et un autre rapport de Magnette qui daterait « d’un peu avant le mois d’août » 1917 témoigne que le bâtonnier liégeois envisage toute une série de solutions : « Il n’est pas possible que quatre millions et demi de Flamands continuent à faire la loi à trois millions de Wallons. (…) J’ai entendu beaucoup de personnes, gens cependant sérieux et cultivés, déclarer que plutôt que de demeurer sous le joug flamand, plutôt que de se laisser imposer une culture et surtout une langue qui n’est pas la leur, ils préfèreraient beaucoup aller où les pousse leur affinité de race, de langue, de mœurs, c’est-à-dire vers la France ».

Dès que la Belgique est libérée, avec les autres membres liégeois de l’Assemblée wallonne (décembre 1918), Magnette signe un Manifeste par lequel il rappelle les griefs wallons : alors que la Flandre est libérée et sans attendre que la Wallonie soit évacuée par l’ennemi, s’est constitué un nouveau gouvernement belge et les Chambres se sont réunies. Le nouveau gouvernement ne comprend pas trois Wallons sur ses douze membres, et aucun qui a pris explicitement la défense des Wallons ; de plus, le gouvernement a annoncé la création prochaine d’une université flamande à Gand, a déclaré admettre le principe du bilinguisme et de l’imposer au pays.

C’est à Charles Magnette (et à Franz Foulon) que l’on doit le surnom de Loi von Bissing attribué à la loi Berryer sur l’emploi des langues en matière administrative ; il est aussi à la pointe du combat contre la loi de flamandisation de l’Université de Gand. En 1921, au moment de la Constituante, il est l’un des premiers à signer et à défendre la proposition de réforme parlementaire préconisée par l’Assemblée wallonne. La même année, il propose, seul, la révision de l’article 49 de la Constitution en vue de permettre la réforme électorale adoptée par l’Assemblée wallonne, réforme qui, si elle avait été appliquée, lui aurait fait perdre, à lui personnellement, son siège parlementaire. Constatant que le nombre de députés n’est pas proportionnel au nombre des électeurs, mais bien au chiffre de la population, il propose de rétablir l’équilibre par l’application d’un diviseur électoral unique (art. 49 de la Constitution). L’incompréhension des autres parlementaires l’affecte profondément. En 1922, pour essayer de résoudre la question de l’Université de Gand, il suggère la création d’une toute nouvelle université flamande à Gand. En janvier 1923, avec Jules Destrée et Max Pastur, il lance un appel aux Wallons de tous les partis en faveur du maintien à Gand d’une université française.

Convaincu de l’existence de différences entre Flamands et Wallons, Charles Magnette préconise un régime différent entre les deux peuples : unilinguisme en Wallonie, bilinguisme en Flandre. Opposé au séparatisme qui, à ses yeux, conduirait les deux peuples vers une autre puissance politique, il se dit convaincu qu’une large extension de l’autonomie régionale, par un notable accroissement des pouvoirs des administrations provinciales, serait de nature à atténuer considérablement, sinon à apaiser de façon complète, le conflit dont souffre le pays (1929). Partisan d’un rattachement culturel, par delà les frontières politiques et douanières, avec la France, il tente désespérément de trouver un terrain d’entente au sujet des francophones de Flandre.

En politique étrangère, il se montre passionnément francophile et déclare n’avoir jamais compris les erreurs fatales du Cabinet du Havre. Une bonne partie de ses efforts personnels est consacrée à les réparer. Avec Paul Deschanel, Paul Doumer, Lucien Hubert, Yves le Trocquer, il a tenté des rapprochements sur tous les terrains. C’est cette même pensée qui le fait adhérer à l’Extension française et lui fait accepter la présidence d’honneur des Amitiés françaises et du Comité d’études radicales franco-belge. Il jouissait d’un prestige immense auprès de la franc-maçonnerie française : en atteste l’existence à Paris d’une Loge Charles Magnette-Les Amitiés franco-belges. Ministre d’État, il a souvent été un ambassadeur officieux de la Belgique à Paris.

« Avec la volonté irréductible de défendre les droits des Wallons, et le souci constant d’éviter les exagérations faciles qui desservent les meilleures causes, Charles Magnette était à ce point wallon que le roi Léopold III, dans son télégramme de condoléances, a relevé cet attachement à la Wallonie comme le trait le plus caractéristique de son activité politique », relève La Défense wallonne en 1937. « Sur son lit de souffrance, Charles Magnette fit envoyer son adhésion à la déclaration de l’Assemblée wallonne condamnant l’amnistie des traîtres ».

 

Paul Delforge

Paul Delforge, La Wallonie et la Première Guerre mondiale. Pour une histoire de la séparation administrative, Namur, Institut Destrée, 2008

 

 

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