Venu à la
littérature par la poésie, le jeune Camille Fabry est très tôt remarqué par
Iwan Gilkin et Edmond Picard, et collabore à La Belgique artistique et
littéraire. Ses premiers recueils de poésies sont couronnés de nombreux
prix. Pendant la Première Guerre mondiale, il célèbre l’héroïsme des blessés
et, en 1920, consacre un essai à Karl Liebknecht en Belgique pendant la
guerre.
Brancardier
volontaire pendant la guerre 1914-1918, Camille Fabry fut blessé sur l’Yser
en avril 1915. Chef de bureau à l’administration communale de Seraing, il
s’y occupe spécialement des Beaux-Arts et est le conservateur de la
Bibliothèque centrale de la ville ; par ses achats et par les conférences
qu’il organise, Fabry devient un propagateur estimé des auteurs wallons : il
encourage la lecture de Krains, Tousseul, Hubermont, Destrée, Simenon,
Glesener… En 1914, il est l’un des fondateurs du Musée de Seraing. En 1918,
il crée les Amitiés wallonnes et, en 1921, l’Université Floréal qui organise
des causeries et des conférences souvent suivies d’une partie récréative.
Utilisant occasionnellement le pseudonyme de Delio, il collabore à l’Almanach
wallon (1923, 1924), à Noss’Pèron et est le
directeur-fondateur de La Wallonie en fleurs, revue des arts et des
lettres (1922-1928). De 1921 à 1925, il est l’un des délégués de Liège à
l’Assemblée wallonne.
Auteur d’un
ouvrage dédié à sa ville natale, il publie aussi, en 1933, des Entretiens
nouveaux, soit 25 dialogues philosophiques et familiers dissertant sur
tous les sujets de la morale laïque. On lui doit aussi le livre À l’aube
d’un monde nouveau (1932). Prix Balzac de la Société des Gens de Lettres
de France, lauréat de l’Académie française, Camille Fabry se révèle être à
la fois un penseur socialiste, un poète, un auteur de théâtre, d’essais et
de récits de guerre.
Président
d’honneur de la Fédération des anciens Combattants sérésiens, il est surtout
le président provincial liégeois de l’œuvre nationale des Anciens
Combattants. . Membre du comité de la section de Liège des Amitiés
françaises (1937-1940), avec Georges Thone et Georges Truffaut, il entend
prendre une part active dans l’organisation de nombreuses manifestations
visant à défendre l’influence de la France en Belgique. Directeur de la
Bibliothèque centrale et du Musée de Seraing, il figure parmi les membres du
comité d’honneur du premier Congrès culturel wallon (Charleroi, 1938).
Membre du Congrès national wallon, Camille Fabry participe au congrès wallon
de 1945 (Liège, 20 et 21 octobre).
Durant la Seconde
Guerre mondiale, Camille Fabry entre en résistance. Dès les 16 février 1940,
à la demande du gouvernement français, il donne une conférence sur
Radio-Paris, au nom des anciens combattants de Belgique. Le poste allemand
de Stuttgart répond de façon agressive aux propos de Fabry qui se retrouve
sur une liste noire allemande au moment de l’invasion. Dès ce moment, Fabry
gagne Paris et, le 13 mai, lance un Appel à toutes les forces vives de
Belgique, par l’intermédiaire du micro de Radio-Paris. Deux jours plus
tard, La Meuse de Paris publie cet Appel. Également menacé de
mort par Le Pays réel, Fabry revient néanmoins en Wallonie et se
cache dans la région de Chaudfontaine où il travaille au profit de la presse
clandestine, puis en venant en aide aux réfractaires. Lieutenant de réserve
de l’Armée belge, Capitaine de l’Armée de Libération, Camille Fabry
contribue aussi à fournir de l’aide aux évadés français de passage à Liège,
pour faciliter leur retour en France. C’est l’ONAC qui sert de couverture à
cette activité clandestine, dénoncée par un traître infiltré dans le réseau.
Camille Fabry échappera de justesse à la perquisition de la Gestapo.
Incorporé au Service SRA Antoine en juin 1942, dont il devient le chef
adjoint, il travaille comme Agent de renseignements au service de la Sûreté
de l’État belge. La famille Fabry paya au prix cher sa lutte contre
l’occupant : arrêté le 21 juillet 1943, le fils cadet, Casimir Fabry, est
transféré à Dachau ; quant à l’épouse, Renée Wéry-Fabry, arrêtée le 21
février 1944, elle ne devait pas revenir de Ravensbruck où elle fut
transférée. Enfin, le gendre de Camille Fabry passa les cinq années de
guerre en captivité comme 65.000 autres prisonniers de guerre wallons.
Paul Delforge