C’est à Chertal
que naît José Happart. Son père y tient une exploitation agricole jusqu’au
jour où il est exproprié pour permettre le développement de la sidérurgie.
Le père Happart achète alors une ferme à Fouron-Saint-Pierre (1962) qu’il
aménage et où il vient s’installer en 1964. Entre la date de l’achat et
celle de l’installation, les communes fouronnaises sont passées de la
province de Liège à celle de Limbourg. Élève du Collège Saint-Hadelin à Visé
puis à l’Institut agricole du Collège Saint-Louis à Waremme, José Happart
doit abandonner ses études pour reprendre la ferme de son père frappé par un
infarctus. Après son service militaire, il est diplômé technicien agricole
A3 après avoir suivi des cours par correspondance en économie et gestion,
avec spécialisation dans l’agriculture.
Syndicaliste
agricole, membre des Jeunes Alliances paysannes, où il occupe plusieurs
fonctions importantes, président des Jeunesses agricoles professionnelles d’Aubel
de 1968 à 1972, membre du comité-directeur des UPA, vice-président des JAP
(Wallonie) de 1970 à 1973, connu pour son audace et sa persévérance dans la
défense d’une cause (n’a-t-il pas fait entrer un taureau au siège du
Parlement lors d’une manifestation d’agriculteurs ?), il rejoint
l’Association des Parents francophones des Fourons qui s’est constituée dans
le but de financer un enseignement en français dans l’entité. Un arrêté du
Conseil d’État empêche en effet l’ouverture d’une école francophone (août-décembre
1976). Cofondateur du groupe d’action Le Hérisson (1977), José
Happart est choisi comme président de l’Association de parents (1978).
Celle-ci deviendra rapidement l’Action fouronnaise. Ce sont les nombreuses
et tumultueuses “ promenades ” du TAK et du VMO qui décident
José Happart à quitter le syndicalisme agricole pour se consacrer
exclusivement à la cause fouronnaise, à la défense de la démocratie et de la
justice (1979).
Sa rencontre, brève
et voulue discrète, avec le roi Baudouin, sur une bretelle d’autoroute à
hauteur de Verviers, place José Happart sous les projecteurs des médias et
allume un feu de haine du côté des extrémistes flamands. Ils seront notamment
400 à manifester devant le Palais royal contre la rencontre entre le roi et le
défenseur d’un autre statut pour Fourons. Au lendemain des incidents provoqués
dans les Fourons par les manifestants flamands en 1980, José Happart, alors
président de l’Action fouronnaise, crée avec Robert Gillon, ancien bras droit
d’André Renard et responsable des Mouvements wallons, l’Association
Wallonie-Fourons (printemps 1980). La fondation de cette association témoigne
symboliquement de la transmission de la tradition du Mouvement wallon d’un
leader à un autre.
Le 10 octobre 1982,
José Happart est élu sur l’unique liste francophone, Retour à Liège,
qui obtient 10 des 15 sièges du conseil communal. Ayant reçu le plus grand
nombre de voix de préférence tout en étant dernier de liste (869 des 2.803
votes valables), José Happart est proposé comme bourgmestre. Prêtant serment
comme premier échevin le 1er janvier 1983, en l’absence de
bourgmestre nommé, il fait fonction. Mais le 19 janvier 1983, la députation
permanente du Limbourg constate que le bourgmestre de Fourons ne se présente
pas à l’examen de néerlandais auquel elle l’a convoqué. Ce jour-là, contestant
la légalité de la convocation de la députation permanente du Limbourg, José
Happart se rend à Paris, au Centre culturel Wallonie-Bruxelles, pour protester
contre la violence faite aux Fouronnais lors des marches du TAK et du
VMO. Les tensions sont particulièrement fortes en cette année 1983, et
atteignent leur paroxysme lorsque trois militaires flamands, proches du
mouvement nationaliste flamand d’extrême-droite Vlaamse militanten Orde
(VMO) tirent, le 29 juillet, sur les clients d’un café francophone à
Fouron-le-Comte, faisant six blessés, dont un grave.
Le 4 février, José
Happart est nommé bourgmestre par le roi, mais son entrée en fonction est
reportée au 31 décembre 1983. Cette nomination deviendra la quadrature du
cercle de ce que l’on va appeler l’affaire Happart. En effet, à la suite d’une
plainte introduite par deux conseillers communaux flamands, la Chambre
flamande du Conseil d’État destitue J. Happart de son mandat, estimant sa
connaissance du néerlandais insuffisante. Arguant du fait que la loi communale
n’impose aucune connaissance linguistique particulière, José Happart rejette
toute forme d’examen linguistique. Entre le 13 octobre 1986 et le 15 octobre
1987, on assiste à ce que la presse appelle les neuf tours du carrousel
fouronnais : solidaire de son maïeur, le Collège échevinal de Fourons
démissionne chaque fois que José Happart est démis de ses fonctions de
bourgmestre. Dès lors, José Happart se retrouve automatiquement premier
échevin et donc bourgmestre ff. Deux gouvernements tombent sur cette question
qui coûte aussi à Charles-Ferdinand Nothomb son poste de ministre de
l’Intérieur. Le 1er janvier 1989, une solution provisoire est
trouvée ; moyennant une série de compensations améliorant la vie des
Fouronnais, José Happart accepte un mandat de premier échevin, tandis que Nico
Droeven, régent en langues germaniques, devient bourgmestre.
Entre-temps, José
Happart a été élu parlementaire européen sur les listes socialistes avec
234.996 voix de préférence (1984). Trois mois plus tard, à l’occasion de la
fête du Peuple fouronnais, le “ Hérisson ” adhère au Parti socialiste. Au
Parlement européen, où 308.117 électeurs le reconduisent en 1989, il est
membre des commissions de l’agriculture et des problèmes des régions ; tenant
compte des difficultés du quart monde qui touche 30 millions d’Européens et de
celui des excédents agricoles, il lance avec Coluche l’opération Resto du Cœur
avant de préciser l’idée et de créer les Coopératives du Cœur. En 1994, il
figure comme tête de liste du PS aux élections européennes et est réélu avec
265.376 voix de préférence. Au Parlement européen, ses interventions sur le
dossier de la vache folle susciteront débats et polémiques.
Fondateur et
président de Wallonie Région d’Europe (1986), José Happart relance l’action du
Mouvement wallon à la fin des années quatre-vingt. En juin 1999, il est élu
sénateur et conformément à son souhait et suite à sa domiciliation à Liège, il
devient ministre de la Région wallonne chargé de l’Agriculture (juillet). Lors
des élections régionales du 13 juin 2004, il emmène la liste socialiste à
Liège et réalise le meilleur score personnel, toutes listes confondues (29.514
voix). En juillet, il est choisi comme président du Parlement wallon où il
succède à Robert Collignon.
Paul Delforge