Institut Destrée - The Destree Institute

               Accueil

Organisation

Recherche scientifique

Education permanente

Conseil

Action

Evénements

 

 

Deuxième congrès de la Concentration wallonne (Liège, 18 octobre 1931)

Troisième congrès de la Concentration wallonne (Namur, 4 septembre 1932)

Quatrième congrès de la Concentration wallonne (Charleroi, le 17 décembre 1933)

Cinquième congrès de la Concentration wallonne (Liège, les 15 et 16 décembre 1934)

Sixième congrès de la Concentration wallonne (Nivelles, le 15 décembre 1935)

Septième congrès de la Concentration wallonne (Verviers, le 13 décembre 1936)

Huitième congrès de la Concentration wallonne (Tournai, le 21 novembre 1937)

Neuvième congrès de la Concentration wallonne (Namur, le 18 décembre 1938)

Congrès extraordinaire de la Concentration wallonne (Namur, le 9 mars 1939)

Dixième congrès de la Concentration wallonne (Namur, 17 décembre 1939)

Au début de 1930, le Comité central de la Ligue d’Action wallonne décide d’organiser un congrès de la Concentration wallonne, à l’occasion de l’exposition internationale de Liège qui s’inscrit, elle-même, dans le cadre des festivités marquant le centenaire de l’Indépendance belge. Les organisateurs souhaitent que toutes les tendances wallonnes soient représentées, depuis les extrémistes utopistes jusqu’aux modérés les plus calmes. Le Congrès, qui se tient dans la cité mosane les 27 et 28 septembre sous la présidence, alternativement, de Charles Defrecheux et de Marcel Franckson, veut affirmer l’unilinguisme de la terre wallonne et examiner les griefs linguistiques, matériels et moraux des Wallons.

Outre les dix-neuf personnalités du comité de patronage, le Congrès recueille l’adhésion de 235 personnes et se tient finalement devant quelque 200 participants. Ceux-ci entendent un exposé de Georges Truffaut, membre de l’Action wallonne, traitant de la coexistence des Flamands et des Wallons au sein de l’État belge, coexistence basée sur l’égalité des deux peuples. Truffaut y va d’une série de griefs à propos des domaines militaire, administratif, judiciaire, financier, électoral. L’orateur conclut son exposé en estimant que les solutions fragmentaires, au coup par coup, ne peuvent plus suffire parce qu’elles lèsent, à chaque fois, les Wallons. Le conflit wallo-flamand doit aboutir, insiste-t-il, à une solution d’ensemble, ce qui implique une révision constitutionnelle. Sur ce dernier point, toutes les tendances wallonnes sont unanimes quel que soit le choix de chacune d’elles quant au contenu de la réforme.

La motion à laquelle se sont ralliés les congressistes se veut intransigeante quant à l’identité française de la Wallonie et reconnaît aux Flamands le droit à leur identité propre. Par ailleurs, c’est bien dans le cadre de la Belgique que doit être recherchée la solution au différend wallo-flamand. Quant à la forme institutionnelle que prendrait cette solution, une Commission ad hoc est chargée d’élaborer un projet à soumettre au congrès suivant. Outre Georges Truffaut, siègent, dans ce Comité des résolutions, Auguste Buisseret, Maurice Dehousse, Jules Denis, Eugène Duchesne, Édouard Felot, Paul Henry, Georges Hubin, Émile Jennissen et François Van Belle.

 

Deuxième congrès de la Concentration wallonne (Liège, 18 octobre 1931)

C’est, à nouveau, à Liège que se tient le deuxième congrès de la Concentration wallonne, le 18 octobre 1931. Outre les traditionnels comité de patronage et Comité organisateur, 37 groupes et ligues sont représentés (l’Assemblée wallonne n’adhéra jamais à la Concentration), ce qui constitue un parterre de 200 personnes environ sous la présidence de François Van Belle. Après l’exposé d’Eugène Duchesne portant sur les diverses solutions possibles en matière de réforme de l’État, des systèmes provincialistes aux systèmes séparatistes, en passant par les systèmes régionalistes plus ou moins accentués, il revient à Émile Jennissen de présenter le choix de la Commission : le projet fédéraliste. Pour celle-ci, il s’agit du seul moyen d’encore maintenir unis, dans le cadre de la Belgique, les deux peuples, en fait séparés. Le projet élaboré est un simple contrat qu’il s’agit d’établir entre Wallons et Flamands. Il se présente comme un loyal essai de vie commune. Ce projet est adopté par le Comité des résolutions en sa séance du 29 septembre, soit cinq mois après le dépôt à la Chambre, par cinq députés frontistes, d’une proposition de révision de la Constitution substituant un régime fédéral au régime unitaire (Proposition Herman Vos). Au terme de la discussion au sein du Congrès wallon, le texte est, sans guère de modifications, ratifié à l’unanimité, moins 9 abstentions, celles, notamment, des délégués de la Fédération des Sociétés wallonnes de l’Arrondissement de Bruxelles. Texte important qui marque un début d’unité wallonne puisqu’aux voix de socialistes et de libéraux, se joignent celles de catholiques tels, par exemple, Élie Baussart et Félix Depresseux, échevin de Liège et président de l’Association catholique de la ville qui se prononce, cependant, à titre personnel.

La physionomie du nouvel État proposée par la Concentration repose sur une douzaine de principes définissant la Belgique comme étant un État fédératif composé de deux régions et d’un territoire fédéral ; la frontière territoriale entre la Flandre et la Wallonie tout comme celle délimitant le territoire fédéral de Bruxelles seraient établies par une loi fédérale qui s’inspirerait largement du droit des peuples de disposer d’eux-mêmes. L’autonomie des deux régions une fois reconnue, chacune élirait une Chambre et disposerait de ses organes exécutifs propres ; quant au territoire fédéral de Bruxelles - où la liberté linguistique absolue serait garantie aux citoyens - il serait dirigé par un conseil général. À propos du pouvoir central ou fédération, les régions lui délégueraient la conduite de la politique étrangère, la défense nationale, l’administration de la colonie, l’établissement d’un système douanier et la sauvegarde de la liberté des cultes. Quant à la question des pouvoirs, la fédération disposerait d’organes exécutifs et d’un Conseil fédéral composé de 20 délégués de chaque Chambre régionale et de cinq délégués du conseil général de Bruxelles. Les ressources financières, quant à elles, proviendraient des recettes douanières, d’une contribution égale des deux régions et d’une imposition fédérale sur le territoire de Bruxelles. Enfin, les organismes communs au niveau fédéral seraient dédoublés en sections française et flamande et la seule connaissance d’une des deux langues régionales permettrait l’accession aux plus hauts grades de la hiérarchie administrative.

La décision des congressistes wallons réunis à Liège suscite les réactions des principaux responsables de l’Assemblée wallonne. Dans la Défense wallonne du 8 novembre, Ivan Paul, son directeur, émet quelques considérations qu’il est intéressant de rapporter. L’initiative du congrès de la Concentration wallonne revenait à quelques-uns des groupements du Mouvement wallon dont les tendances sont les plus radicales ; par contre, de nombreuses associations wallonnes n’ayant jamais fait preuve d’extrémisme et ayant, tout au contraire, souvent manifesté leur attachement à l’unité belge, y étaient représentées. Ce fait donne d’autant plus de poids au vote acquis en faveur du fédéralisme, tandis qu’il témoigne d’une exaspération certaine en Wallonie. Pour Ivan Paul, L’Assemblée wallonne s’est toujours efforcée de maintenir le mouvement wallon dans le respect de l’unité de l’État belge. Ce qui vient de se passer à Liège prouve que des efforts dans ce sens s’opposent aux voeux d’une fraction importante de ce mouvement. Dès lors se pose la question : quelles influences l’emporteront finalement en Wallonie ? Tout dépendra de l’attitude du gouvernement et du monde politique bruxellois en ce qui concerne la révision constitutionnelle. Cette révision est inéluctable pour assurer l’égalité politique absolue des Flamands et des Wallons tout en rendant possible le maintien de l’État belge.

Et cela ne peut résulter que d’une révision constitutionnelle. Tel est le constat d’un homme qui, quatorze mois plus tard, ayant perdu foi dans la Belgique, quittera l’Assemblée wallonne, où il milite depuis 1912, pour rejoindre le camp des irrédentistes.

Quant à l’autre dirigeant de cette même Assemblée, en l’occurrence l’ancien sénateur libéral Joseph-Maurice Remouchamps, son opposition au choix fait par les congressistes de la Concentration wallonne est d’un autre ordre. Instaurer le fédéralisme entraînerait la création d’un Parlement et d’un gouvernement tant wallons que flamands. La conséquence fatale qui s’ensuivrait, c’est que les deux régions, devenues autonomes, tomberaient l’une et l’autre aux mains d’un seul parti. L’absolutisme politique, au parlement (régional) comme au gouvernement (régional) régnerait dans les deux contrées, qui connaîtraient ainsi l’abominable régime dont nous avons tant souffert avant la guerre (La Défense wallonne, décembre 1931).

Une chose est de se prononcer pour le fédéralisme, autre chose est de traduire une telle résolution du Congrès dans les faits, soit, concrètement, couler la résolution en forme de proposition susceptible d’être déposée sur le bureau de l’une des deux Chambres. Lors de la journée du 18 octobre, le président du congrès de la Concentration, François Van Belle, fait approuver la création d’un conseil général groupant les délégués des ligues ou groupes wallons admettant les décisions du Congrès ; la tâche prioritaire de ce Conseil étant, précisément, de mettre au point les détails du projet de Constitution fédérale adopté. Rapidement constitué, ce conseil général met plusieurs questions à l’examen : frontière linguistique, statut de l’agglomération bruxelloise, emploi des langues dans l’enseignement et dans l’administration, secteurs pour lesquels des projets de loi étaient soumis à la Chambre, emploi des langues en matière judiciaire ; mais de la mise au point de l’organisation fédérative du pays, il n’en est pas question dans l’intervalle des deux congrès de la Concentration, celui de 1932 étant fixé au 4 septembre à Namur. Il faut dire qu’en outre, sans doute, des divergences entre les membres du conseil général sur la forme à donner à la nouvelle structure de l’État, les militants wallons sont probablement quelque peu échaudés par l’accueil réservé par les députés à la proposition Vos ; la discussion, en juillet surtout, sur la prise en considération de celle-ci donne lieu à de vifs incidents et se clôture, le 19, par un vote négatif acquis par assis et levé. Dans son rapport devant les congressistes wallons réunis en septembre, le président François Van Belle regrette cette carence et renvoie au prochain conseil général la tâche de mettre la chose au point et de travailler à sa réalisation.

 

Troisième congrès de la Concentration wallonne (Namur, 4 septembre 1932)

Le Congrès de Namur (4 septembre 1932) n’a donc pas à débattre de la forme à donner à une Constitution fédérale. Par contre, outre divers rapports et résolutions, les participants ratifient les statuts institutionnalisant la Concentration wallonne. C’est ainsi qu’il est décidé que celle-ci est une fédération de groupements et non un organisme centralisé ayant des sections partout pas plus qu’elle n’est un groupement de personnes. Désormais, trois instances régissent la vie de la Concentration : le Congrès annuel, le conseil général et le Bureau du conseil général. La représentation des groupes tant pour le Congrès que pour le Conseil, est proportionnelle au nombre de leurs membres, pour le congrès, un délégué par groupe de 25 à 100 membres, six délégués maximum par groupe de plus de 2.001 ; pour le Conseil, un délégué pour les groupes comportant un nombre de membres inférieur ou égal à 500, deux délégués pour les groupes comptant plus de 500 adhérents. Le Bureau, quant à lui, se compose de cinq personnes élues par le Conseil. Une cotisation de 0,50 F par membre est réclamée à chacun des groupes ou ligues affiliés à la Concentration.

Le but de celle-ci est la réalisation du programme suivant : l’unilinguisme de la terre wallonne, l’égalité complète entre la Wallonie et la Flandre dans tous les domaines, la liberté linguistique à Bruxelles, le fédéralisme étant considéré comme un des moyens de réaliser ce programme.

La fonction du conseil général est de décider de la tactique à suivre par la Concentration et de prendre les mesures utiles pour assurer l’application des décisions du Congrès. Quant au Bureau, se réunissant au moins une fois par mois, il est chargé de l’administration générale et de l’exécution des décisions du Conseil. C’est lui également qui veille à la préparation des réunions du Conseil et à l’organisation des Congrès tout comme il est responsable de la propagande. Son président assume la direction des séances du Bureau et du conseil général de même que celle des Congrès. Il est secondé par un vice-président, un trésorier, un secrétaire et un secrétaire adjoint.

À quelle configuration concrète cette organisation statutaire aboutit-elle, compte tenu qu’en 1932 la règle des délégués par groupement est appliquée pour la première fois et cela, avant même que les statuts soient approuvés ? De cette année-là jusqu’en 1936 (révision des statuts), la situation se présentait, approximativement, comme suit :

 

Année

Nbre de groupes

Total

des affiliés

Délégués

au Congrès

Délégués au

Conseil général

1932

47

6677

79

54

1933

52

7269

87

56

1934

55

3860

61

48

1935

60

4302

69

55

1936

64

4377

70

57

 

Quant à la composition du Bureau de la Concentration pour la même période, elle mérite également quelque attention.

 

Année

Président

Vice-Président

Secrétaire

Secrétaire adjoint

Trésorier

1933

Van Belle

Chapeaux

de Warzée

Evrard

Firket

1934

Van Belle

Buisseret

de Warzée

Duchesne

Firket

1935

Van Belle

Buisseret

de Warzée

Duchesne

Firket

1936

Van Belle

Buisseret

de Warzée

Duchesne

Firket

 

À partir de 1933, année de l’installation officielle du Bureau, jusqu’à la fin 1936, cet organe est incontestablement aux mains de Liégeois ; seul Robert Chapaux déroge à la règle, il est délégué de la Ligue wallonne de Saint-Gilles. Qui plus est, hormis ce dernier, Léon Évrard et Eugène Duchesne, délégué de l’Association wallonne du Personnel de l’État (AWPÉ), les quatre autres militent à la Ligue d’Action wallonne. Cette sur-représentation liégeoise ne manque pas de soulever des critiques.

Cependant, lorsque l’on considère la répartition géographique des groupements affiliés à la Concentration, il apparaît que la région liégeoise est avantagée dans la représentation. Voici, en exemple, la situation pour 1931-1933 :

 

 

1931

1932

1933

Liège

12

21

22

Namur

 6

 5

 5

Bruxelles

et agglomération

 5

10

12

Hainaut

 4

 6

 6

Brabant wallon

 3

 2

 4

Brabant flamand

 2

 1

 -

Paris

 1

 0

 1

Luxembourg

 1

 2

 5

 

Quatrième congrès de la Concentration wallonne (Charleroi, le 17 décembre 1933)

Le quatrième congrès de la Concentration wallonne se tient le 17 décembre 1933 à Charleroi. Dans son discours d’ouverture, le président Van Belle dresse le bilan de l’année écoulée et souligne que la législation linguistique déjà votée ou en projet coïncide, en bonne partie, avec le programme de la Concentration. Néanmoins, il persiste à croire que la totalité de ce programme sera difficilement atteinte dans le cadre actuel de l’État belge. Aussi invite-t-il les congressistes à mettre sur pied un projet de réforme constitutionnelle complète, estimant le moment venu de développer la partie du programme relative à l’organisation fédérative de la Belgique. C’est du Congrès, de l’assemblée des militants wallons délégués de leur groupement respectif (ils sont 52 mouvements représentés par 56 délégués), que devait venir l’initiative ou la décision ultime ; au conseil général revenant la tâche de trouver les moyens à utiliser pour rendre effectifs les choix de l’assemblée. Mais celle-ci est loin d’être homogène quant à la question des solutions à apporter au problème des rapports Bruxelles-Flandre-Wallonie. Le Congrès de Charleroi en est un exemple supplémentaire.

En vue de ce congrès, les instances dirigeantes de la Concentration ont été saisies de quatre propositions d’action wallonne. L’une émane de l’Assemblée wallonne, non affiliée à la Concentration mais qui souhaite qu’un accord se réalise sur un programme minimum, à savoir des revendications portant sur un quota de postes ministériels à attribuer à des Wallons, sur le respect total de l’unilinguisme de la Wallonie, sur le rapprochement économique franco-belge, sur la défense de la frontière Est du pays en collaboration avec l’armée française. Et elle propose également que, jusqu’à nouvel ordre, soit suspendue toute discussion de doctrine, cause principale des divisions qui affaiblissent le Mouvement wallon. Une autre demande émane de l’Association wallonne du Personnel de l’État portant sur les moyens à employer pour réaliser l’unité de front entre tous les organismes wallons en vue de la défense d’un programme minimum. En clair, cela signifie que l’Association soutient, attitude constante par ailleurs, la position de l’Assemblée wallonne. Dans la répartition des mandats à la Concentration, l’AWPÉ a droit au maximum, soit, pour le Congrès, à six délégués, ce qui, concrètement, constitue la délégation la plus importante et représente, avec ses dix sections, une force de 2.050 membres.

Une troisième proposition émane de la Ligue wallonne de Bruxelles, forte de 110 militants en 1933. Estimant que l’égalité des citoyens inscrite dans la Constitution n’est pas respectée, la Ligue interpelle les militants réunis en ces termes : Les populations wallonnes et d’expression française ont-elles encore intérêt à continuer d’adhérer à ce contrat faussé entièrement à leur détriment en administration générale, intérieur, sécurité militaire, ententes économiques internationales, outillage public, etc. ? La Ligue pose donc la question du régime à adopter par ces populations ; ce qu’elle fait d’une manière qui manifeste sa préférence. Sera-ce la fédération, l’autonomie ou l’intégration dans la nation française, dont la frontière contiguë procure l’accès facile à la mer que les deux autres modes leur enlèveraient et sans lequel leur commerce, leur industrie et elles-mêmes seraient frappées de mort ? Enfin, une dernière proposition aux congressistes est le fait du Parti wallon de Bruxelles dont les délégués représentent 260 membres. Ce groupement suggère à la Concentration d’envisager la réalisation du salut de la Wallonie par des méthodes et des moyens nouveaux plus énergiques, non parlementaires, différents de ceux que mirent en oeuvre les grands Wallons de 1830 aux prises avec des brimades et des épreuves pareilles à celles que subissent, présentement, les Wallons.

La Commission des résolutions mise en place par le Bureau présente ses conclusions quant aux propositions reçues. Si elle se montre favorable à la plupart des revendications formulées par l’Assemblée wallonne, par contre, elle s’oppose à la suspension de toute discussion de doctrine : on n’arrête pas des discussions de principes et il n’y a aucun avantage à tenter de le faire. À la Ligue wallonne et au Parti wallon, la Commission soutient que l’action entreprise par la Concentration doit tenir compte de l’opinion publique en Wallonie, laquelle est, vis-à-vis de la Belgique et du flamingantisme, dans une position d’attente. Aussi ne servirait-il à rien à la Concentration d’adopter une formule extrémiste ; elle a déjà joué un rôle d’avant-garde en indiquant la solution fédérale comme un des moyens de réaliser le programme wallon. Momentanément elle ne peut que se tenir à ses statuts, d’autant plus que les débats parlementaires sur la législation linguistique donnent d’importants résultats quant aux revendications des Wallons. En conclusion, la Commission propose un ordre du jour reprenant quasi littéralement le texte soumis par l’Assemblée wallonne, ordre du jour qui fait l’objet d’un long débat, révélateur des positions divergentes au sein de la Concentration. Parmi les partisans du texte, certains estiment qu’il s’agit là d’un programme d’union, car face au danger allemand, Flamands et Wallons doivent faire bloc ; d’autres, en l’occurrence deux délégués de l’AWPÉ, soulignent que leur mouvement, sous peine de perdre ses milliers de membres, ne peut se rallier au fédéralisme ; aussi l’AWPÉ serait-elle prête à quitter la Concentration si celle-ci veut faire triompher des tendances “ révolutionnaires ”. Les autres intervenants émettent des critiques sur le texte de l’Assemblée wallonne, proposent des amendements à celui de la Commission des résolutions, voire soumettent un ordre du jour différent. En fin de journée, les 43 délégués encore présents se mettent d’accord sur le texte suivant :

 

Le quatrième congrès de la Concentration wallonne,

Appelé à se prononcer sur un programme minimum d’action,

Tout en confirmant les décisions des congrès antérieurs,

Constate l’accord unanime des Wallons sur les revendications suivantes :

1° Respect, dans tous les domaines, de l’unilinguisme de la Wallonie et des Wallons de l’agglomération bruxelloise,

Égalité de représentation dans le gouvernement et dans tous les organismes de l’État,

3° Défense effective de la frontière en collaboration étroite avec l’armée française,

4° Union économique avec la France.

Estime que la réalisation de ce programme doit être poursuivie par tous les groupements et journaux wallons, sous la réserve de leurs tendances particulières et dans un large esprit de fraternité.

 

Ainsi la synthèse se fait au nom d’une union qui cache difficilement des dissensions majeures qu’un intervenant évoquait en réclamant le maintien, au sein du Mouvement wallon, d’une aile droite, d’un centre et d’une aile gauche.

 

Cinquième congrès de la Concentration wallonne (Liège, les 15 et 16 décembre 1934)

En 1934, la Belgique n’est pas encore sortie de la terrible crise économique, financière et donc sociale qui l’a atteinte quelques années plus tôt dans le prolongement du krach de Wall Street. C’est dans ce contexte que le conseil général de la Concentration wallonne fixe l’objet du cinquième Congrès, l’analyse de la situation économique en Wallonie. Les congressistes réunis à Liège, les 15 et 16 décembre, n’entendent pas moins de dix rapports et communications ayant trait à cette problématique sous les aspects de l’entente franco-wallonne plutôt que franco-belge, des effets pour la Wallonie de la concentration industrielle et bancaire à Bruxelles, de la situation agricole en Wallonie compte tenu de la puissance et de l’influence du Boerenbond, du réseau de communications tant routières et ferroviaires que fluviales. La plupart des exposés se clôturent par le vote d’une résolution.

 

Sixième congrès de la Concentration wallonne (Nivelles, le 15 décembre 1935)

L’année 1935 voit l’aboutissement de la législation linguistique instaurant l’unilinguisme régional, fixant ainsi le principe de territorialité linguistique. Néanmoins, en Flandre, certains ne veulent pas en rester là. En août 1935, l’hebdomadaire Nieuw Vlaanderen – lancé fin 1934 dans le milieu universitaire de Louvain – publie un article choc, La Concentration des forces flamandes sur l’idée fédérale. En octobre, le Congrès du Katholieke Vlaamsche Landsbond prend, lui aussi, le tournant fédéraliste. C’est dans ce contexte communautaire que se tient le sixième congrès de la Concentration wallonne, à Nivelles, le 15 décembre. En ouvrant les débats, le président François Van Belle s’interroge, les Flamands n’étant pas satisfaits, la Wallonie va-t-elle consentir à de nouvelles concessions pour maintenir la paix et la fraternité entre les deux peuples ? Et de conclure son exposé en insistant sur la nécessité d’une révision radicale et définitive de la Constitution : l’État unitaire est désormais une impossibilité.

Arille Carlier présente le projet de résolution qui, par une série de constatations aux plans démographique, linguistique, économique, militaire et culturel, tend à démontrer l’infériorité dans laquelle se trouvent les Wallons ou la discrimination qui leur est faite ; il aboutit à revendiquer, pour le peuple wallon, le droit de disposer librement de lui-même. Quant à la nouvelle organisation, l’orateur reprend le propos de Jules Destrée en 1912 : …elle sera ce que les circonstances la feront. Sera-ce le fédéralisme ou la création d’un État wallon, un fédéralisme franco-wallon ou l’incorporation de la Wallonie à la France ? C’est impossible à dire, car, ajoute Carlier, nous ne serons pas les seuls maîtres de la situation. De la discussion sur le projet de résolution, il ressort que la plupart des intervenants sont favorables au texte proposé. Les délégués des ligues d’Etterbeek, de Saint-Josse-ten-Noode et de Saint-Gilles insistent pour que ce même droit soit également revendiqué pour Bruxelles. L’un de ceux-ci, soulignant que Bruxelles est le bastion qui défend la Wallonie contre l’emprise des Flamands, lance un appel pour les Bruxellois francophones, car Si Bruxelles est perdue, la Wallonie est perdue. La revendication concernant Bruxelles n’est pas retenue suite à l’intervention de trois congressistes. Georges Truffaut estime que le problème de Bruxelles a depuis trop longtemps empoisonné le Mouvement wallon et qu’il n’entend pas diminuer les intérêts vitaux de la Wallonie pour le résoudre. Pour Auguste Buisseret, ce n’est pas à un congrès wallon de vider des querelles entre Bruxellois, ni de leur imposer une orientation quelconque. Que Bruxelles organise sa défense et réclame son autonomie, elle trouvera l’appui sans réserve du Mouvement wallon. Quant au président Van Belle, il distingue les Wallons de Bruxelles, partie intégrante du peuple wallon qu’il n’est pas question d’abandonner, et les Bruxellois francophones qui doivent se déterminer eux-mêmes avant qu’une collaboration avec le Mouvement wallon puisse être envisagée. En conséquence de tout ceci, la motion proposée est ratifiée à l’unanimité moins trois voix et l’abstention bruxelloise.

 

Septième congrès de la Concentration wallonne (Verviers, le 13 décembre 1936)

Le septième congrès de la Concentration se tient la matinée du 13 décembre 1936 à Verviers. Le rapport du président Van Belle et la discussion qui s’ensuit portent sur la politique intérieure et sur la politique extérieure et militaire (notamment l’accord entre les frontistes et les rexistes et celui des catholiques flamands avec les frontistes). En dépit de la brièveté du compte rendu officiel, il apparaît que la révision des statuts est un autre temps fort de la journée. Au congrès de 1934 déjà, un exposé de l’abbé Jules Mahieu, signalant la création, à Charleroi, de l’Office des Conférences wallonnes, proposait que la Concentration wallonne reconnaisse celui-ci comme son organisme de propagande. Au Congrès de 1935, un délégué de la Ligue wallonne de Charleroi présente un projet d’organisation de la Concentration qui modifie sensiblement l’agencement antérieur. Entre les organes de direction et les ligues ou groupements locaux, s’insèrent deux structures nouvelles : la Centrale de Propagande et la Fédération régionale. Les Centrales, au nombre de deux, auraient leur siège à Liège et à Charleroi ; il leur reviendrait la tâche de créer, dans leur ressort respectif, les Fédérations régionales ; leur directeur serait choisi par le Bureau de la Concentration ; enfin, dans leur mission de propagande, elles veilleraient à répandre les organes de presse de la Concentration wallonne : L’Action wallonne et La Wallonie nouvelle. La Fédération régionale, réunissant ligues et groupes de son ressort, appliquerait sur le terrain régional les directives reçues de la Centrale de propagande dont elle dépend ; elle serait dirigée par un comité de cinq membres élus, pour deux ans, parmi les délégués des ligues et groupements.

L’importance des fédérations se mesure également au regard des organes de direction de la Concentration. En effet, il est proposé que les cinq membres du Bureau directeur soient élus, pour deux ans, parmi les délégués des fédérations. En outre, la création d’un Comité politique est conseillée ; il serait composé du Bureau directeur et des délégués des Fédérations régionales ; il aurait pour tâche d’étudier le programme de la Concentration wallonne, de suivre les événements politiques et de prendre les décisions que les circonstances imposent ou suggèrent.

Le texte de l’exposé du délégué de Charleroi, à Nivelles, en décembre 1935, ayant été remis tardivement, le président Van Belle indique qu’il serait adressé aux affiliés dont les avis devraient être rentrés pour la fin janvier 1936. C’est donc à Verviers, en décembre 1936, que les congressistes se prononcent sur les modifications des statuts de la Concentration. Au niveau des organes directeurs, les seuls changements concernent les quotas de représentation au conseil général des groupes affiliés et l’entrée dans ce Conseil d’un délégué de chaque Fédération régionale, structure nouvellement créée. Les Fédérations régionales sont constituées dans chaque chef-lieu d’arrondissement de Wallonie ; quant à leurs tâches, il s’agit de coordonner le mouvement régional, d’exécuter les décisions des congrès, du conseil général et du Bureau et de donner des directives aux Ligues locales. En outre, chaque Fédération organise, sous son contrôle, un Office de propagande visant à constituer un fonds de documentation, à organiser des conférences, à lancer tracts et affiches. Certaines propositions de la Ligue wallonne de Charleroi ont été retenues, mais on est loin de la structure pyramidale voulue par le groupe carolorégien.

Un autre événement d’importance est à signaler en cette même année 1936, lié au succès surprenant du parti rexiste aux élections de mai. En effet, les militants wallons proches de l’abbé Mahieu lancent un appel à un large regroupement des forces wallonnes pour barrer le chemin au parti de Léon Degrelle ; c’est, en juin, la constitution du Front démocratique wallon. La création du Front irrite les dirigeants de la Concentration wallonne qui y voient une dissidence. Le différend s’aplanit et le Front fait partie de la Concentration à titre d’organisme autonome (9 février 1937).

Le renouvellement du Bureau de la Concentration pour 1937 amène des changements notables (25 février). Tout d’abord, François Van Belle décline la reconduction de son mandat. Parmi les raisons évoquées, il fait montre d’une déception certaine. Rappelant les cinq années d’activités qu’il a consacrées à la Concentration, il a l’impression d’avoir réussi dans une certaine mesure, cependant il n’a pas lieu de se déclarer satisfait. Certes les groupes de toutes tendances du Mouvement wallon sont venus à la Concentration et y ont confronté leurs thèses, ce qui a amené plus de compréhension entre Wallons. Mais au-delà, la collaboration semble s’arrêter ; les décisions, à peine votées par le congrès, sont remises en question. C’est à une véritable tâche de Pénélope qu’il faut s’astreindre et Van Belle avoue ne plus pouvoir s’y résoudre. Quant aux membres composant le nouveau Bureau, mis à part Eugène de Warzée restant en fonction pour assurer la continuité, ils reflètent davantage les diverses régions de Wallonie. Dans l’équipe entrent l’abbé Jules Mahieu de la Ligue wallonne de Courcelles, Arille Carlier de la Ligue wallonne de Charleroi, Émile Rousseau de la Fédération de Verviers et le commandant en retraite Antoine Vanniesbecq de la Fédération de Soignies. Cette configuration, restée inchangée en 1938, subit quelques modifications l’année suivante ; c’est ainsi que Gustave Guiot, Valère Risselin et Charles Joniaux, respectivement de la Ligue wallonne de Namur, de celle de Tournai et de la Ligue d’Action wallonne de Liège, prennent place au Bureau. La répartition des fonctions au sein du Bureau, quant à elle, se présente comme suit :

 

Année

Président

Vice-Président

Secrétaire

Secrétaire adjoint

Trésorier

1937

Abbé Mahieu

Carlier

De Warzée

Rousseau

Vanniesbecq

1938

Abbé Mahieu

Carlier

De Warzée

Rousseau

Vanniesbecq

1939

Abbé Mahieu

Carlier

Guiot

Risselin

Joniaux

 

L’adhésion des groupements à la Concentration et leur représentation dans ses instances s’établit, théoriquement, de la manière suivante :

 

Année

Nbre de groupes

Total des affiliés

Délégués

au Congrès

Délégués au

Conseil général

1937

51

3409

81

60 + 11 délégués fédér.

1938

70

4355

104

81 + 11

 

 

D’après le secrétaire, Eugène De Warzée, la liste serait la suivante :

 

Année

Nbre de groupes

Total des affiliés

1937

76

4.089

1938

100

4.580

1939

66

3.762

 

Huitième congrès de la Concentration wallonne (Tournai, le 21 novembre 1937)

Le huitième Congrès de la Concentration wallonne se tient, le 21 novembre 1937, à Tournai sous la présidence de l’abbé Jules Mahieu. Après le traditionnel rapport sur l’activité des organes du mouvement au cours de l’année écoulée, les militants ratifient un ajout aux statuts concernant les adhésions individuelles à la Concentration, là où n’existe pas de groupement affilié. Ils entendent ensuite trois exposés portant respectivement sur le statut linguistique de l’armée (A. Vanniesbecq), les intellectuels et la question wallonne (Luc Javaux, président du Groupement national des Universitaires wallons) et le programme politique de la Concentration wallonne.

Ce dernier sujet est présenté par le vice-président Arille Carlier pour qui deux faits dominent l’avenir de la Belgique, à savoir, d’une part, le nationalisme flamand qui imprègne à des degrés divers tous les partis de Flandre et, d’autre part, la situation minoritaire de la Wallonie au point de vue de sa population. De ce double état de fait, l’orateur conclut : si l’État Belgique conserve son organisation unitaire, nous allons vers un asservissement croissant des Wallons à la volonté flamande. Il n’y a là rien de bien neuf, le constat était dejà celui-là en 1912. Quant à la forme du régime à instaurer pour épargner, à la Wallonie, cette situation de sujétion, les dirigeants de la Concentration proposent une confédération d’États : Wallonie, Bruxelles, Flandre - le lien belge étant maintenu par une union réelle ou personnelle. L’abandon de la forme fédéraliste tient, en effet, au fait que dans ce système, les affaires étrangères sont un domaine commun entre les États fédérés. Or l’orientation officielle de la politique extérieure est loin de rencontrer les voeux des Wallons. Si l’autonomie de la Wallonie, à tous les niveaux, est indispensable, il est non moins indispensable que la souveraineté de l’État wallon soit reconnue. À ses pouvoirs constitutionnels propres, législatif, exécutif et judiciaire, doivent être adjoints les autres attributs de la souveraineté extérieure, c’est-à-dire la défense nationale et les traités de commerce. Néanmoins, la Wallonie n’a pas l’initiative des opérations, la Flandre la conservera sans doute longtemps encore. Aussi, obligée de se battre sur un terrain que la Flandre choisira, à l’heure fixée par elle, la Wallonie – par la voix de la Concentration wallonne – réclame plusieurs mesures pratiques, parmi lesquelles la fixation définitive de la limite septentrionale de la Wallonie, en recourant, pour les parties contestées, à un plébiscite, non par commune, mais par section de commune formant une agglomération distincte. En outre, la Concentration demande que les partis politiques s’organisent en fonction de la dualité ethnique du pays.

Après une longue discussion et quelques légères modifications, l’ordre du jour proposé par Carlier est adopté. Certains militants ont, cependant, fait remarquer qu’il ne s’agit plus de voter des motions, mais, tout au contraire, d’agir. Les délégués de la Ligue d’Action wallonne créent la surprise : en son sein, se prépare, sous la direction de Fernand Dehousse, chargé de cours à l’Université de Liège, une proposition de loi sur le statut fédéral de l’État belge.

Le 30 janvier 1938, le Bureau de la Concentration wallonne réaffirme la revendication de l’autonomie complète de la Wallonie et se désolidarise de tous projets fédéralistes. Cette prise de position vise incontestablement le projet de la Ligue d’Action wallonne avant que son contenu en soit connu. Dans L’Action wallonne du 15 mars, Georges Truffaut annonce l’achèvement du projet et il en trace les grandes lignes ; le 17, les militants de l’Action wallonne approuvent le texte. Le 20, une entrevue entre Georges Thone, Georges Truffaut et Fernand Dehousse, d’une part, et l’abbé Mahieu, président de la Concentration, d’autre part, aboutit à un certain consensus. En conséquence de quoi, le conseil général de la Concentration décide, le 3 avril, de faire campagne en faveur du projet fédéraliste de la Ligue d’Action wallonne. Pourtant, les relations de celle-ci avec les dirigeants de la Concentration se détériorent pour aboutir à la rupture, le 9 novembre 1938.

 

Neuvième congrès de la Concentration wallonne (Namur, le 18 décembre 1938)

Le neuvième congrès de la Concentration se réunit à Namur, le 18 décembre, devant plus d’une centaine de délégués. Eugène de Warzée rappelle que le conseil général soutient la proposition de loi sur le fédéralisme déposée à l’initiative de Georges Truffaut. Il ajoute toutefois que le Conseil n’a qu’une confiance fort limitée dans une telle réforme et qu’il maintient la revendication du droit pour le peuple wallon de disposer de lui-même. Cependant, après le refus par la Chambre, le 2 février 1939, de la prise en considération de la proposition Truffaut, le Bureau de la Concentration invite les ligues wallonnes à protester auprès des députés de leur arrondissement.

 

Congrès extraordinaire de la Concentration wallonne (Namur, le 9 mars 1939)

La démission du gouvernement Pierlot entraîne la dissolution des Chambres, le 6 mars ; les élections sont fixées au 2 avril. Et c’est le coup d’éclat, un Congrès extraordinaire de la Concentration convoqué d’urgence décide, le 9 mars, la fondation du Parti wallon indépendant, ce que tant l’Assemblée wallonne, que les anciens dirigeants de la Concentration et que la Ligue d’Action wallonne ont toujours refusé. Hormis l’abbé Mahieu et Arille Carlier, aucun militant wallon marquant ne figure sur les listes du PWI. Et l’échec est à la mesure de l’impréparation et du manque de cadres, le parti ne totalise même pas 10.000 voix pour les sept arrondissements où il se présente. Cet échec n’améliore certes pas le climat au sein de la Concentration. Le Bureau ne se réunit ni en mars ni en avril. En mai, la séance a lieu avec deux membres sur cinq, Carlier et de Warzée. Du côté du conseil général, même carence : deux séances se tiennent, l’une le 4 juin, l’autre le 19 novembre à laquelle dix groupements seulement sont représentés.

 

Dixième congrès de la Concentration wallonne (Namur, 17 décembre 1939)

Le dixième congrès est, cependant, préparé et fixé au 17 décembre 1939, à Namur. Mais le marasme rongeait. Écrivant au secrétaire Guiot, Carlier note le 27 novembre : Vous ne devez pas vous faire grande illusion sur la vitalité des groupes locaux. La plupart n’existent plus que sur le papier. Plus de réunion, plus d’encaissement des cotisations, etc. N’attendez pas grand chose du congrès… Nous ferons le congrès pour attester que nous sommes toujours là, mais ne croyez pas à la possibilité d’une manifestation importante. Pour l’heure, il n’y a qu’une chose à faire : durer et maintenir le flambeau. Et ce n’est pas, semble-t-il, l’inquiétude provoquée par la situation internationale qui explique une telle décomposition. Pour Carlier, elle est due au sabotage dont est victime la Concentration de la part de certains groupes wallons, à la malveillance qui s’acharne sur l’abbé Mahieu mais, également, à l’action délétère de la presse quotidienne. Celle-ci exalte la fraternité wallo-flamande dans les cantonnements et, de la sorte, jette le désarroi dans les esprits.

L’ordre du jour du dixième congrès reflète l’état de déliquescence dans lequel la Concentration wallonne est plongée. En effet, ni la question de la réforme de l’État ni, surtout, le problème posé par la guerre et par l’orientation de la politique extérieure de la Belgique ne figurent au programme de la journée.

L’aventure de la Concentration wallonne et les espoirs qu’elle avait fait naître, dix ans plus tôt, s’évanouissent. Cependant, ces années constituent autant de jalons qui permettront la cohésion des mouvements de résistance. Ceux-ci, sans nul doute, engrangeront les acquis – et perpétueront les contradictions – de la Concentration wallonne.

 Micheline Libon

 

 

L'Institut Destrée L'Institut Destrée,
ONG partenaire officiel de l'UNESCO (statut de consultation) et 
en statut consultatif spécial auprès du Conseil économique et social
des Nations Unies (ECOSOC) depuis 2012
  The Destree Institute The Destrée Institute,
NGO official partner of UNESCO (consultative status) and 
in Special consultative status with the United Nations Economic
and Social Council (ECOSOC) since 2012 

www.institut-destree.eu  -  www.institut-destree.org  -  www.wallonie-en-ligne.net   ©   Institut Destrée  -  The Destree Institute